C’est le second Gala organisé par Women Of Africa, et qui se tenait le 16 avril, à Paris, le temps d’une soirée bel canto qui lorgnait jusqu’à Gershwin. Une soirée qui marque la vitalité de ce sujet associant chant, musique classique, Afrique (et outremer).
Belle époque pour l’Afrique Lyrique à Paris
Cette soirée, suite d’un premier concert en 2016, se déroulait au Théâtre des Champs – Elysées, dans la foulée également de la première édition d’un concours lyrique. Celui-ci s’est tenu quelques jours auparavant (9 avril) au Palais de la Porte Dorée. L’événement, on s’en doute, a attiré, en plus du public habituel ou de passage, un certain nombre de passionnés, d’intéressés. Egalement des d’artistes sensible à ces liens entre musique classique et africanité.
Sur scène, au sein de la conque, l’orchestre symphonique de la Garde républicaine et son chœur d’homme (en deuxième partie) ouvrent la soirée en s’installant sur scène. Pour mémoire, les musiciens de la garde républicaine se produisent, à quelques musiciens près, en uniforme (Chef Sébastien Billard compris). Cela donne à la fois un certain standing et une relative étrangeté au concert.
On pourrait se demander dans quel cadre on est tombé. Cependant, avec le décor des années 30, la scène ne déparerait pas dans un extrait de Mort sur le Nil. De plus, il y a très certainement eu de tels orchestres venus jouer, à cette époque : du Verdi, Bizet, Offenbach, et quelques airs de chorale, au début du siècle, en remontant le fleuve Zambèze ou Sénégal. L’orchestre de la garde républicaine possède ses propres codes, ce qui amène à confier une des pièces à la lieutenant-colonel Aurore Tillac, chef du chœur. Le protocole empêche d’adjoindre facilement à l’orchestre, des « supplémentaires », comme le ferait un autre orchestre.
Ainsi, malgré le cadre et la circonstance, l’orchestre et le chœur garde son unité habituelle.
Des solistes engagés pour valoriser l’Art Lyrique
Les solistes honorent donc cette soirée hommage à l’Afrique et au chant lyrique. A noter que lors de deux pièces chorales inspirées de musiques traditionnelles, deux chanteurs de chœur livrent un travail soigné, vertus de l’ensemble, et de ses capacités de répétitions. Forcément plus limitées dans la cadre d’un gala, avec des solistes rencontrés peu de temps avant, et donc, sur des pièces plus balisées du répertoire classique.
La distribution comprenait donc huit chanteurs : Leila Brédent, Elisabeth Moussous, Cyrielle Ndiki Nya, Kimmy Skota et Adriana Bignagni-Lesca. Cette dernière est la fraiche lauréate du concours qui s’est tenu au Palais de la Porte Dorée, quelques jours plus tôt. Pour les hommes, moins nombreux, on retrouve Edwin Fardini, Blaise Malaba, Levy Sekgapane. Tous maîtrisent bien les codes de la soirée, et ont une première expérience dans le milieu classique. ON le voit bien, le ce milieu s’avère plus métissé qu’on ne l’imagine parfois.
Un appel aux dons pour le projet d’une école de Musique en Afrique
En ouverture, Patricia Djomseu (présidente de Women of Africa et maitresse de cérémonie) a rappelé, en pratique, l’importance que peu revêtir le pouvoir et le temps de la parole, en donnant sa marque à la soirée qui a enchaîné les airs, duos ou trois répartis entre les chanteurs, avant le très symbolique Air des esclaves de Nabucco en guise de finale. En deuxième partie Kimmy Skota livrait un des moments, peut-être les plus authentiques, avec une berceuse traditionnelle accompagnée par les cordes. La soirée se veut lyrique, pour ne pas décevoir d’abord les amateurs de belles-voix. L’Afrique est surtout mentionnée dans l’appel au don pour une école à bâtir en regard des autres actions, nombreuses, de Women of Africa qui parraine la soirée. Les liens des solistes avec différents pays d’Afrique (ou l’outremer) sont à chercher dans les biographies du programme de salle et seule Kimmy Skota ose la robe avec un sobre tissu wax imprimé.
Il n’est pas facile de donner du sens à une telle soirée. Même si le moment, on le sent, fait date sur scène, et probablement pour de nombreuses personnes en salles. D’ailleurs, ces derniers se re-croisent au foyer ou devant le théâtre en début et fin de soirée. En réalité, une partie du public assiste, entre les deux tours de la présidentielle, à un concert assez traditionnel, sans finalement trop s’imprégner « d’africanité ».
Un répertoire plutôt classique et populaire
Le déroulé présente donc des tubes : Manon Lescaut, La Wally, La Barcarolle des Contes d’Hoffmann, le duo des fleurs de Lakmé, des extraits de Porgy and Bess, certains extraits plus légers de La fille du régiment. Adriana Bignagni-Lesca qui ouvrait la deuxième partie chante la Séguedille de Carmen. Au sein de cet exercice avec des œuvres à la fois populaires et du répertoire, l’équilibre des ensembles, il est intéressant de voir le choix individuel des solistes en résonance avec le caractère fort de certaines héroïnes.
A ce jeu, c’est Cyrielle Ndiki Nya et sa Leonora de la Force du Destin de Verdi qui a reçu la plus forte ovation du public… Date déjà prise par Women of Africa pour un nouveau concours de chant dès 2023 et un gala en 2024.
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